L'accueil, un beau mystère
Accueillir, un beau mystère
L’accueil est décrit comme un temps ritualisé du passage à l’état de malade, un temps où l’institution modèle l’accueilli. Si cette ouverture à un lien social particulier est nécessaire, elle ne peut se substituer à la rencontre thérapeutique, fruit du hasard.
« Tagadam pam pam. Ratatatasoin Tagadam pam pam. » En ce mois de mai, l’Harmonie Municipale de Laragne défile tous cuivres dehors dans le parc de l’hôpital psychiatrique. « Tagadam pam pam. » Les tambours et la grosse caisse retentissent et rythment la marche des musiciens. Les clarinettes, saxos et trompettes entonnent une Riquita échappée d’un petit bal musette. C’est la fête. La rue de Lappe s’est transportée dans les Hautes-Alpes. Quelques patients suivent le défilé en tapant dans les mains. Ils reconnaissent sous les casquettes quelques infirmiers ravis de faire la java en ce début d’après-midi. Les musiciens s’arrêtent devant chaque unité et jouent quelques airs, un peu surannés mais entraînants. L’Harmonie est là pour célébrer la sortie du numéro zéro du nouveau journal : « Le passe-Muraille ». Un exemplaire est remis à chacun, soignants ou soignés. Le Pimpon d’une ambulance déchire l’espace. C’est une entrée. A l’unité « Les Gentianes » les infirmiers, en service, se préparent. On leur a annoncé l’arrivée d’un patient en plein état maniaque. Hospitalisé d’office (ASPDRE), il refuse les soins. Ça promet. Les musiciens poursuivent imperturbables le charleston qu’ils ont commencé. Régis, le patient sort de l’ambulance. Il n’en revient pas. La fanfare, rien que pour lui. Il est hilare. « Vous savez accueillir, dit-il aux infirmiers de l’unité. La fanfare, c’est comme si j’étais président de la République ou Préfet des Hautes-Alpes. » On lui remet un exemplaire du Passe-Muraille. Quand le psychiatre de garde arrive pour faire son entrée, il ne proteste pas. Bien sûr qu’il va rester. Un hôpital où l’on accueille les gens en musique, ça inspire confiance. Les infirmiers de l’unité soufflent.
Surréaliste cette entrée ? Qu’importe. Régis s’est senti accueilli. Comment se serait passé son entrée s’il était arrivé un autre jour ou le matin même ? Aurait-il si facilement consenti aux soins sans l’Harmonie Municipale ?
Qu’entend-on par accueil ?
M. Formarier[1] définit l’accueil comme un concept « nomade » travaillé dans de nombreuses disciplines telles que la sociologie, la psychologie sociale ou comportementale. C’est aussi un de ces « concepts » slogans qui devrait révolutionner les pratiques mais bute sur la réalité des pouvoirs au sein d’organisations qui s’interrogent peu sur leur fonctionnement. Plus de trente ans se sont écoulés depuis ses premières élaborations « modernes » et l’on est toujours aussi mal accueilli dans nos hôpitaux somatiques ou psychiatriques. Il suffit d’avoir un traitement qui a vaguement l’air « psy » pour être reçu à l’hôpital somatique comme un chien dans un jeu de quilles. Le patient détenu sera accueilli comme un pestiféré à l’hôpital psychiatrique, quant à celui qui arrive en ASPDRE, la chambre d’isolement lui est souvent promise.
L’accueil va tellement peu de soi dans nos organisations qu’on ne cesse d’élaborer des protocoles qui s’interposent entre l’accueilli et l’accueillant. Leur résultat est tellement peu probant qu’il faut régulièrement inventer d’autres concepts slogans qui ne changent guère les pratiques. On a mis l’usager au centre des différents dispositifs, on développe l’humanitude (qui suppose une certaine bravitude), on forme à tout va les soignants à la bientraitance mais quelque chose résiste et continue à résister.
Accueillir. Un beau mystère. Accueillir les patients en fanfare, ça ne marche qu’une fois. Pas la peine de l’inscrire dans le protocole. Et puis nombreux sont ceux qui préfèrent le rap et le hip hop. Un mystère donc. Un mystère qui résiste à l’accréditation et à toutes les évaluations des pratiques professionnelles (EPP). On pourrait presque dire que la qualité de l’accueil dans nos institutions est inversement proportionnelle à la précision des protocoles qui l’encadrent. Aborder la problématique de l’accueil par son aspect le plus administratif, routinier, ritualisé et lui opposer la fantaisie, le hasard, l’imprévu on pourrait presque dire que c’est trop facile, que ce n’est pas du jeu. Et pourtant.
On peut respecter à la lettre toutes les recommandations et spécifications du protocole d’accueil, on peut être disponible à l’arrivant, être à son écoute sans susciter chez lui le désir de s’engager dans le soin. Il semble même que nos efforts, vains, n’ont d’autre effet que l’inciter à partir pour ne plus revenir.
Notre questionnement se complexifie encore quand nous prenons en compte que ceux que nous accueillons sont parfois contraints, qu’ils dénient tout problème et que leur seul objectif est de partir, de fuir par tous les moyens. Ils refusent, avec l’énergie du désespoir, tout ce que nous pouvons leur proposer. Leur entrée se déroule dans le bruit et la fureur. Le protocole est parfois bousculé. Et pourtant, contre toute attente, quelque chose se noue-là qui fait qu’ils vont trouver une place, qu’ils vont rebondir et se reconstruire au fil du temps.
Accueillir, un beau mystère, vraiment.
On peut assigner quatre objectifs à l’accueil et plus spécifiquement à l’’entretien d’accueil :
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entrer en relation avec le patient afin de le soutenir psychiquement et émotionnellement,
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lui présenter l’institution qui le reçoit,
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recueillir des informations afin de nourrir le diagnostic médical et/ou infirmier et de comprendre la demande de soins,
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agir sur sa problématique subjective en permettant dès cette première rencontre un réaménagement des défenses.
Un peu d’étymologie
L’étymologie nous alerte sur la complexité du terme et donc sur les actes qu’il décrit. Le verbe accueillir apparaît dans la langue au XIème-XIIème siècle. Il vient du latin classique colligere (cueillir) qui donne en latin populaire accoligere. Jusqu’au XVIIème siècle, le verbe a le sens de saisir, attaquer, chasser ainsi que l’atteste son emploi dans La chanson de Roland[2]. Dans les patois de l’Est, accueillir signifie pousser le bétail, jeter des pierres.[3] Accueillir, pour la langue, n’a donc pas toujours signifié hospitalité, façon de recevoir, de se comporter avec une personne qui se présente ; à l’origine il prend précisément le sens contraire. Colligere se rattache à la racine indo-européenne leg (cueillir, choisir, rassembler) qui donne via le grec legein dire et via le latin legere lire.
De fait, tous ceux qui se présentent à la porte des cités au Moyen-âge ne sont pas bien accueillis. Il suffit de penser aux lépreux précédés d’une clochette qui les annonce ; ils sont relégués dans les léproseries, les lazarets, établissements situés dans les zones Seveso de l’époque, zones sur lesquelles on bâtira bien plus tard, selon Michel Foucault, les premiers hôpitaux psychiatriques.[4]
La commanderie templière de la Couvertoirade, en plein Larzac, a conservé de cette époque le dispositif qui permettait de faire le « don de l’eau » à ceux que l’on n’accueillait pas dans la cité. Entre l'église et l'enceinte, un petit escalier grossièrement taillé dans le rocher mène à un petit évier qui permettait en cas de guerre ou d'épidémies, via un système de canalisations, de désaltérer pèlerins et autres voyageurs tout en maintenant fermées les portes du village. Le « don de l’eau » c’est le minimum vital de l’accueil.
Nous pouvons retenir que l’accueil ne va pas de soi, que la langue traduit un doute entre ceux qu’il convient d’accueillir et ceux qu’il faut chasser, éventuellement à coup de pierres. Lépreux, fous divers et variés, psychopathes et pédophiles aujourd’hui, en psychiatrie, font partie de ceux que l’on chasse. N’oublions pas les migrants d’Afrique, des Balkans, du Maghreb et du Machrek. Les lois visant à réglementer leur entrée et leurs séjours sur notre territoire se multiplient sans que le problème en soit le moins du monde résolu.
Accueillir d’une certaine façon, c’est choisir, séparer le bon grain de l’ivraie. Si nous suivons cette hypothèse, nous dirons que nos protocoles d’accueil ont pour but non pas d’améliorer notre capacité à recevoir celui qui vient, de lui dérouler en quelque sorte le tapis rouge mais de faire un tri, d’orienter celui qui vient et qui doit montrer patte blanche et ensuite mais ensuite seulement de le recevoir au mieux. C’est d’ailleurs pour cela qu’on commence par lui demander, ici ou là, sa carte vitale et les coordonnées de sa mutuelle. Retenons quelques verbes synonymes : réunir, associer, adjoindre.
L’aspect institutionnel voire social[5] est au centre de ce début de réflexion sur l’accueil. Les « déchets humains » décrits par le sociologue et philosophe Z. Bauman composent une population en surnombre d’êtres qui sont rejetés, inassimilables, exclus qui ne peuvent rien faire de leur existence. Les étrangers sont d’abord des importuns porteurs de peur et d’angoisse. Bauman, dans un autre essai incisif, paru en 2020[6], montre comment hommes et femmes politiques et médias en sympathie, ont exploité la peur pour la répandre d’abord chez les plus déshérités. A ceux-là on a promis d’ériger des murs plus que des ponts. Peut-on être des soignants accueillants dans une société qui ne l’est plus, quand, nous-mêmes précarisés voire exclus, on partage soi-même les mêmes peurs ?
Ce regard institutionnel et social ne saurait constituer le seul point de vue pour le chercheur. Le soin ne saurait se limiter à une gestion de flux. Pas de soin sans rencontre. Comment, sans cela, pourrait-on porter psychiquement, émotionnellement, cet entrant ?
Le terme de rencontre est intéressant à plus d’un titre. Il naît du latin contra qui signifiait « contre », « en face de » et « au contraire ». Il est progressivement remplacé en bas latin par la préposition composée incontra. On en identifie deux dérivés contrarius (opposé) et contrata (regio), « le pays d’en face ». Le mot rencontre (employé aussi au masculin jusqu’au XVIIème siècle) apparaît au XIIème siècle, il précède de deux siècles le verbe rencontrer. Il associe le sens de « coup de dés » et celui de « combat ». A l’origine, il décrit l’engagement de deux forces ennemies peu importantes et qui se trouvent en présence, par hasard. La rencontre est définie au XIVème siècle comme un hasard, un événement fortuit par lequel on se trouve dans telle ou telle situation. Elle décrit au XVIème siècle le fait pour deux personnes de se trouver en contact, d’être rapprochées d’abord par hasard puis par extension d’une manière concertée ou prévue.[7]
Si lors de l’accueil, seul l’arrivant est en mouvement (c’est le concept qui est nomade pas l’accueillant), dans la rencontre les deux forces progressent l’une vers l’autre, sans bien souvent le savoir. La friction qui en découle produit des étincelles ou de la lumière. S’il est possible de penser un protocole d’accueil, il est tout à fait impossible de programmer une rencontre. On peut accueillir une personne sans la rencontrer et on pourrait presque dire que pour la langue, tout au moins, mieux on l’accueille moins on la rencontre. L’accueil procède d’une assimilation, d’un rassemblement, d’une négation de la différence, la rencontre repose sur la différence avec celui du « pays d’en face ».
L’asile, un lieu d’accueil ?
L’asile a longtemps été le principal lieu du « soin » en psychiatrie. De sa fondation par les Arabes jusqu’au développement chaotique du secteur psychiatrique, l’asile, devenu entretemps, le Centre Hospitalier Spécialisé a été le lieu essentiel du premier contact avec la psychiatrie. Le développement du secteur a multiplié les structures et les modes de soins. L’accueil ne saurait donc être pensé d’une manière univoque. Ne serait-ce qu’en raison du fait que si le premier contact a lieu au domicile du patient, c’est le patient (ou ses proches) qui accueille les soignants et non l’inverse. Il en va de même chaque fois que le lieu du soin n’est pas organisé par des soignants de psychiatrie.
L’accueil, en psychiatrie, a fait couler beaucoup d’encre et souvent suscité de nombreuses réserves. Des travaux du sociologue Erving Goffman[8] aux recherches/actions menées par Rosenham[9], en passant par le constat accablant des soignants de retour des camps de prisonniers à la fin de la seconde guerre mondiale, c’est devenu un euphémisme d’écrire que la psychiatrie est une discipline « médicale » peu accueillante. Il y avait parfois peu d’écarts entre un hôpital psychiatrique et un camp de prisonniers. D’ailleurs, aujourd’hui encore, nombreux sont les détenus patients qui préfèrent retourner dans la cellule qu’ils partagent avec deux codétenus plutôt que dormir seuls dans la chambre d’isolement généreusement offerte par préfets, directeurs d’hôpitaux et médecins.
Goffman définit l’institution « totale » (parfois traduite par totalitaire) comme un lieu de résidence et de travail où un grand nombre d’individus, placés dans la même situation et coupés du monde extérieur pour une période relativement longue, mènent ensemble une vie recluse dont les modalités sont explicitement et minutieusement réglées. On retrouve dans l’asile, institution totale, une dimension englobante, finement décrite par Goffman. Le rôle assigné aux malades (Goffman écrit « reclus ») l’est par diverses techniques de « mortification », de « dépersonnalisation » et « d’aliénation ». Les cérémonies d’admissions, autrement dit d’accueil, remplissent une fonction importante dans ce processus. Disons simplement que le patient est progressivement dépossédé de ce qui constitue ses territoires du moi (espace personnel –distance intime chez Hall[10]-, place, tour, territoire de possession, réserves d’information et domaines réservés de la conversation[11]). Goffman divise la « carrière morale » des malades mentaux en deux principales phases : la carrière préhospitalière et la carrière hospitalière. La carrière préhospitalière s’achève par un phénomène d’illusion rétrospective ; à la lumière de l’hospitalisation, tous les comportements précédents du patient seront réinterprétés a posteriori comme les symptômes évidents d’une maladie qu’il fallait traiter. Entre le malade et les différentes catégories de personnel se crée un antagonisme et des images stéréotypées de l’autre qui forgent la façon donc chacun se représente la position de l’autre et sa propre position. Comment se prétendre « orienté rétablissement » sans prendre en compte les descriptions précises de Goffman et de Rosenham ? Ces carrières suscitées par l’organisation des institutions et des établissements sont tout à fait incompatibles avec l’espoir que devrait entretenir voire développer le soin.
On retrouve donc ces éléments dans l’expérience que Rosenham a menée aux Etats-Unis dans les années 70. Huit pseudo-patients (parmi lesquels trois psychologues, un pédiatre, un psychiatre, une mère de famille et un peintre) ont eu pour consigne de dire lors de leur premier entretien avec un professionnel, qu'ils entendaient des « voix ». Les pseudos patients ont été transférés à la suite de cet entretien, dans des centres spécialisés dans lesquels ils avaient pour consigne, une fois arrivés, de se comporter normalement et d’arrêter de simuler les légers symptômes présentés lors de l'entretien. L'expérience dura sept jours pour certains, 52 pour d'autres. Avant qu'ils ne soient « libérés » avec un diagnostic de « schizophrénie en inexplicable et miraculeuse rémission ». Il a même fallu, pour les derniers, que les premiers sortis usent de leur autorité pour faire libérer leurs collègues. Un des faux patients qui passaient son temps à prendre des notes sur l’expérience qu’il vivait a été taxé de « graphomanie ». Dans ce type d’organisation, tout ce que dit ou fait le patient relève de la pathologie et du symptôme pour des soignants programmés à reconnaître en quoi l’hospitalisé est malade.
Afin d’être complet, précisons que chez Goffman le patient peut négocier un espace de vie qui lui permet d’obtenir une relative mais précaire autonomie.
Pussin, Pinel et Esquirol, les fondateurs du traitement moral et de l’asile se préoccupaient de l’accueil. Esquirol a théorisé l’asile comme lieu d’accueil. Chez les Grecs anciens est asulon un sanctuaire qui derrière ses barrières symboliques ou réelles est une terre inviolable. Nul n’a le droit de prise à l’intérieur de son enceinte, on peut donc venir s’y réfugier. L’ethnologue du quotidien P. Dibie note que cet espace implique des interdits ultimes « comme d’y accoucher, d’y faire l’amour ou pire encore d’y mourir […| Toute personne porteuse de souillure ne peut en franchir les bornes, ce qui explique qu’à l’entrée des sanctuaires des vases sacrés remplis d’eau permettaient à chacun de se purifier. »[12] Les sanctuaires sont souvent situés aux limites des terres cultivées de la cité, « en bordure des forêts, des montagnes et érigés pour marquer à la fois une frontière et un point de jonction entre le monde policé et le monde sauvage qui s’ouvre au-delà et apparaît comme une menace. »[13] La folie, en termes de représentations sociales, renvoie à la souillure mentale et à la contamination, à l’image de la lèpre ou de la peste.[14] Il faut s’en protéger.
Au fil du temps, le traitement moral devenant une coquille vide, la théorie de la dégénérescence en ôte tout optimisme thérapeutique, à quelques rares exceptions près[15], nul ne se soucie plus d’accueillir dans l’asile autarcique une population de dégénérés contraints.
L’accueil redevient une priorité avec le développement du secteur et la création dans les années 1980 des Centres d’Accueil et de Crise (CAC) puis des Centres d’Accueil Thérapeutiques à Temps Partiel (CATTP). Ces lieux situés au cœur de la cité, à la différence des asiles, supposent la création d’un temps de soin spécifiquement consacré à l’accueil. Le psychiatre G. Baillon[16], et quelques autres, va contribuer à développer cet accueil hors les murs en insistant sur le rôle et la fonction d’accueil des infirmiers.[17]
Les entretiens d’accueil infirmiers vont pouvoir se développer. La pratique de l’entretien va se généraliser progressivement et atteindre les Centres Hospitaliers eux-mêmes. Il faudra pouvoir en contrôler le développement d’où les protocoles et les actions de formation continue proposées à jet continu. S’il s’agit toujours d’entretiens d’accueil, il n’empêche que l’on n’accueille pas de la même façon en ville, dans une structure qui se veut un Centre d’Accueil, et dans un hôpital psychiatrique. On peut noter le développement des services « Porte » dans de nombreux centres hospitaliers psychiatriques. Il s’agit de recevoir le nouvel arrivant, de le garder le temps de la crise avant de le dispatcher vers le lieu de soin qui prendra le soin en charge. On disjoint ainsi les deux fonctions : accueil et soin. Ces services « Porte » sont l’équivalent des « Urgences » somatiques.
Il existe bien sûr des exceptions, ainsi l’infirmier V. Billé et ses collègues de Charles Perrens à Bordeaux ont-ils développé le QPGE (Questionnaire Préventif de la Gestion des Emotions), qui au plus près de l’entrée d’un patient lui propose un entretien destiné à élaborer un plan de prévention personnalisé à partir de sa façon habituelle de faire face à ce qui le met en colère, l’attriste ou l’effraie.[18] Les travaux de l’infirmière Y. Quenum, vont dans le même sens.[19] Il s’agit de favoriser l’accueil du patient sans avoir recours à l’isolement et à la contention, soit directement au moment de l’accueil, soit en permettant au patient d’élaborer un Plan de Crise Conjoint qui régulera, lors d’une nouvelle hospitalisation, ses relations avec les soignants et l’institution psychiatrique. Notons que ces deux chercheurs sont de jeunes infirmiers, dont les publications récentes, ouvrent de nouvelles voies à la pratique soignante.
Encore une fois c’est sur le seuil, ou aux portes que l’on accueille. De ce point de vue un centre d’accueil est un oxymore, un non-sens, on n’accueille qu’à la périphérie, que sur le seuil. Que se passe-t-il donc aux marches, aux marges, sur le seuil des lieux de soins psychiatriques ?
Notions de passage
Chaque changement de lieu, d’état, de position sociale et d’âge est accompagné de rites, dits rites de passage. L’ethnologue français, Van Gennep, a écrit en 1909, un fameux ouvrage[20] qui leur est consacré. Partout, explique-t-il, dans le monde ancien, primitif ou « semi-civilisé », les portes des villes, les bornes et limites de territoires ont un caractère sacré : les franchir implique toutes sortes de précautions. Le roi de Sparte partant en guerre s’arrêtait à la frontière de la Cité pour y effectuer des sacrifices. Ensuite seulement, il entrait dans le no mans’ land où avaient lieu les combats. Les généraux romains, quant à eux, de retour de campagne, s’arrêtaient aux frontières pour y procéder à des rites de réintégration. On n’entre en psychiatrie, on ne quitte le monde des gens normaux qu’en suivant un certain nombre de rites. On ne réintègre ce monde qu’en passant un certain nombre d’étapes. C’est sur ce motif spatial, celui du franchissement d’un seuil, que Van Gennep construit le schéma ternaire qui lui permet d’expliquer la plupart des rites. Tout rite de passage comporte trois temps : préliminaire, liminaire (c’est-à-dire sur le seuil) et post-liminaire. Du point de vue de l’acteur, on décrira la séparation (de l’état ou du lieu antérieur), la marge (l’entre-deux, le seuil) et l’agrégation au nouvel état. L’accueil est le temps du passage. On peut le penser avec les trois mêmes temps. En psychiatrie, le rite de passage fait passer du statut d’homme libre et sain à celui de malade mental, séparation radicale s’il en est.
Van Gennep nous invite à considérer chaque société générale comme une sorte de maison divisée en chambres et couloirs. Sortir d’un groupe ou entrer en contact avec un autre sont des actes ritualisés. Pour passer d’une pièce à l’autre, il faut emprunter un couloir. On change d’état comme on change de pièce. Tout passage nous oblige à quitter quelque chose pour naître à autre chose.
Martine Ségalen[21] définit le rite ou rituel comme un ensemble d’actes formalisés, porteurs d’une dimension symbolique. Il est caractérisé par une configuration spatio-temporelle spécifique, par le recours à une série d’objets, par des systèmes de comportements et de langages spécifiques, par des signes emblématiques dont le sens codé constitue l’un des biens communs du groupe. Pour Pierre Erny[22], on ne peut parler de rite que s’il existe une conduite spécifique (individuelle ou collective) qui prend le corps comme support et qui est liée à des situations et à des règles précises, donc codifiées même si l’on admet une marge d’improvisation. Cette situation répète quelque chose d’une autre conduite. Elle est destinée à être répétée. Elle a un sens vécu et une valeur symbolique pour ses acteurs ou pour ses témoins. Elle suppose une attitude mentale de l’ordre de la croyance, voire de la foi, et de ce fait un certain rapport au sacré. Ces différents éléments sont présents lors de l’accueil.
Bourdieu[23] propose de substituer au concept de rite de passage celui de rite de légitimation, rite de consécration, rite d’institution, en insistant sur la mise en évidence du pouvoir des autorités qui l’instaurent. Le rite ne fait pas passer, mais sanctionne, sanctifie le nouvel ordre établi. Bourdieu met en lumière la nécessité d’une instance de légitimation. Qu’il institue ou qu’il fasse passer, le rite ne peut être auto-administré, il lui faut une autorité supérieure.
Si nous suivons ces pistes de réflexion, nous ferons le constat que tout accueil suppose des procédures investies d’une façon sous-jacente par chaque membre du collectif. La course actuelle à l’élaboration de protocoles d’accueil fait au mieux double-emploi, au pire elle insinue un conflit entre les procédures explicites et les implicites. Il est permis de se demander si cette « protocolomanie » n’est pas due à la perte de légitimité des autorités supérieures quel que soit le nom qu’on leur donne.
Institution du manque et institution en creux
Les pratiques d’accueil opposent régulièrement les structures de soins ambulatoires et hospitalières. Les soignants, cadres en tête, qui exercent à l’hôpital reprochent régulièrement à leurs collègues des CMP et CATTP de mal accueillir les sortants ou les candidats à l’hospitalisation. A les entendre les CMP devraient être ouverts sept jours sur sept, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Les patients seraient ainsi constamment sous contrôle, comme si, au fond, un CMP devrait être une sorte d’hôpital psychiatrique en ville. Les soignants qui exercent dans la cité s’étonnent de la même façon de l’aspect carcéral des pratiques d’accueil hospitalières. Confrontés à des contraintes différentes, les deux types de structures n’ont pas les mêmes modalités d’entrée et donc d’accueil.
Ainsi que l’écrit Paul Fustier : « Il existe, dans notre tradition, une conception de l’aide qui suppose d’une part un vide, d’autre part un appel en provenance de ce vide, et finalement un plein qui remplira le vide et fera alors disparaître le problème. »[24] L’hôpital psychiatrique répond à cette conception : « A l’origine un être à aider, dont la souffrance serait la conséquence d’une absence ou d’un manque. Cette absence ou ce vide fait appel, ce qui est entendu comme une demande. Répondre à cette demande est souvent compris comme devoir combler le vide, à la place y mettre du plein, substituer une présence à une absence, trouver solutions et réponses qui colmatent la brèche à partir de laquelle l’individu à aider fait appel. »[25] Les pratiques d’accueil à l’hôpital naissent de cette conception « caritative » du soin. Une institution peut se comprendre selon Fustier, à partir de ses organisateurs psychiques (imago maternelle, fantasmes originaires ou non, interdit œdipien). L’organisateur psychique « travaille » la vie institutionnelle, il infléchit et oriente les pratiques. Le dispositif institutionnel peut être compris comme une structure d’accueil de l’organisateur psychique.
Freud met en évidence que ce n’est pas en comblant, en répondant à la demande que l’on vient en aide à une personne en souffrance mais en proposant un dispositif « en creux », qui ne répond pas au manque, mais qui le reçoit, de sorte que le sujet lui-même puisse avoir à le traiter.[26] « L’accueil de la souffrance et du manque ne se réalise pas par un remplissage mais par un retrait. Là où la réponse traditionnelle proposait du plein sous la forme d’une prothèse, la psychanalyse propose une absence qui rendra possible le changement. »[27] Les structures de soins en ville correspondraient à ce modèle d’une institution en creux.
Les modalités d’accueil dans ces deux types d’institution ne peuvent donc qu’être différentes. L’entretien infirmier apparaît comme la modalité idéale d’accueil dans un CMP (CATTP ou CAC). Son but est de recueillir des données permettant d’identifier non pas d’abord la maladie mais la demande du patient. On n’y cherche pas en quoi la personne est semblable aux autres mais en quoi sa demande est singulière et comment elle a les moyens, les ressources psychiques pour se mettre en mouvement à partir de l’absence dont elle se plaint.
L’accueil à l’hôpital passe plus rarement par un entretien d’accueil. L’entretien d’entrée médico-infirmier se borne à vérifier que le tri a été bien fait, que la personne souffre bien d’une maladie répertoriée et d’un manque identifiable, d’où la prescription d’un traitement médicamenteux et institutionnel (éléments de surveillance, sorties autorisées ou non, isolement et contention, etc.). En ce sens, l’isolement fait intrinsèquement partie de l’accueil. Il prend la forme d’un sas d’observation qui vise à modeler l’accueilli au fonctionnement institutionnel. La relation avec le patient s’étaye sur la capacité des soignants à répondre le plus totalement possible aux besoins du patient. Les soignants « grâce au mécanisme d’identification projective » manifestent « une compréhension « presque magique » des besoins » du patient, « se montrant apte à les anticiper, à y répondre dans l’immédiat, et à les satisfaire à la perfection. Le désir « d’être porté, couché, tourné, nourri », est ressenti par identification et peut donc être parfaitement satisfait. »[28] L’entretien informel joue un rôle essentiel dans l’accueil infirmier à l’hôpital. Il prend prétexte des actes simples de la vie quotidienne et notamment du nursing. Il repose sur la nécessaire ambigüité de ces soins que fait que leur aspect maternant ne sera jamais posé. Chacun fera comme si. Il n’est évidemment pas explicitement interdit de proposer un entretien d’accueil infirmier. Selon les infirmiers V. Depré et J.M. Jamet, cet entretien d’accueil vise deux objectifs : « aboutir à une relation de confiance qui favorisera par la suite l’acceptation des soins qui seront proposés au malade. »[29] (16) Le deuxième objectif « sera de relever suffisamment d’éléments par l’observation et une écoute attentive pour établir un diagnostic infirmier. » Relation de confiance, favoriser l’acceptation des soins, observer, poser un diagnostic infirmier, si l’optique n’est pas médicale, elle est institutionnelle. Le but de l’entretien n’est pas de favoriser une rencontre moteur d’une élaboration psychique mais l’adaptation du patient au fonctionnement institutionnel.
La rencontre
Les tenants de la psychothérapie institutionnelle ont très vite remis en question le fonctionnement de l’institution psychiatrique et notamment ses procédures d’accueil. Ils en ont décrit le fonctionnement iatrogène et ont proposé de la traiter notamment par la création d’associations de patients dotés d’un réel pouvoir. L’association d’entraide (le Club) prend en charge l’accueil au même titre que les soignants. Elle entre éventuellement en conflit avec le collectif soignant obligeant celui-ci à se décentrer pour chercher à résoudre le conflit. La psychothérapie institutionnelle, dans l’acception d’Oury, consiste à « programmer le hasard ». « Dans l’existence, ce qui marque, écrit Oury, c’est ce qui arrive par surprise. La surprise, l’événement, « l’étonnement phénoménologique », c’est ce qui est question quand on parle de rencontre. »[30] Tout maniaque qu’il est, Régis sait bien qu’il va à l’hôpital psychiatrique avec tout ce que cela implique. La fanfare crée un effet de surprise qui rend une rencontre possible. Nous sommes soudain très loin de l’accueil programmé, appréhendé par les soignants qui l’attendent. Programmer le hasard cela signifie programmer l’existence, la configuration collective pour qu’il puisse y avoir du hasard. « On peut remplacer le mot « hasard » par « vide », au sens de Lao-Tseu : il faut qu’il y ait du vide pour que ça marche, en opposition au « plein » compulsionnel des administrations. »[31]
Pour qu’il y ait du hasard, il faut aller le chercher. Il faut se lever du bureau infirmier. Il faut sortir du CMP. Il faut traîner sur le seuil. Il faut des visites à domicile qui se fassent à pied. Il faut être en mouvement et pas simplement assis à attendre le client. « Or, en marchant dans ce chemin qui se fait en marchant, il peut y avoir une occasion, une rencontre qui, par hasard, va modifier votre vie. Rencontre avec l’Autre, avec les autres, avec une phrase écrite il y a cinq cents ans et qui va modifier votre existence. »[32]
Pour qu’il y ait une fanfare, il faut qu’un soignant soit allé au Québec, à la rencontre d’une association d’entraide, il faut qu’il ait trouvé belle et l’idée et sa façon de fonctionner, il faut qu’il convainque ses collègues, les médecins de l’institution, les patients, il faut que l’institution soit prête à accueillir cette idée, que son fonctionnement ne soit pas bloqué par trop de pesanteurs, il faut qu’une association, rassemblant usagers et professionnels, soit créée, il faut qu’elle se dote d’un journal destiné à rassembler les contributions des uns et des autres, il faut que quelqu’un lance l’idée de faire appel à l’harmonie locale pour donner au premier numéro du journal toute la publicité qu’il convient, il faut que les liens qui unissent la ville et l’hôpital soient tels que sitôt dit sitôt fait. Il faut toutes ces conditions réunies pour accueillir Régis. Il faut tout cela pour aider le hasard à se manifester. « L’espace thérapeutique, c’est l’effet de rencontre ; il vient de ce qu’on est capable de produire comme rencontre. »[33]
Oury articule son argumentaire avec le concept de « transpassible » développé par le philosophe H. Maldiney. Le transpassible est ce qui permet qu’il y ait du passible, du mouvement, ce qui permet qu’il y ait passage.[34] « Maldiney dit que chez le schizophrène il y a un effondrement du transpassible, ce qui a comme conséquence qu’il souffre de ne pas avoir d’événement. Cela ne justifierait-il pas la fonction du psychothérapeute, qui est d’essayer, non pas de créer des événements […] mais de créer des occasions pour qu’il puisse y avoir des rencontres, qui peut-être, pourraient retisser des événements ? »[35]
Conclusion
Créer des occasions qui puissent favoriser des rencontres qui pourraient retisser des événements, on pourrait ainsi redéfinir l’accueil. L’entretien d’accueil pourrait être une de ces occasions à la condition de ne pas s’effectuer le recueil de données à la main. En invitant l’arrivant à raconter ce qui lui arrive, ce qui fait histoire pour lui, en s’ouvrant à lui, en le considérant comme une personne étrangère qu’on ne cherchera pas à assimiler par tous les moyens, en faisant en nous une place à cet autre, on rend une rencontre possible. Et tant pis s’il refuse de prendre son traitement, s’il n’adhère pas totalement au fonctionnement institutionnel. Il suffit qu’il y ait un espace de rencontre possible. Bien sûr, tous les phénomènes collectifs que nous avons croisés n’en continueront pas moins à exister : l’institution du plein versus l’institution « en creux », l’assimilation plus ou moins forcée au fonctionnement collectif, le passage de la bonne santé et de l’autonomie à la maladie dûment constatée avec les stigmates qui en découlent, la dépendance qu’elle suscite. Ne nous y trompons pas l’accueil doit à la fois favoriser une rencontre entre deux personnes et fonctionner comme l’ouverture d’un lien social, ritualisée avec et par des automatismes sociaux et culturels. C’est parce qu’il faut tenir tous ces bouts en même temps que l’accueil constitue un beau mystère.
Dominique Friard, ISP.
Une version plus courte et plus ancienne de ce texte a été publiée dans la revue Santé Mentale sous le titre : "Accueillir, un beau mystère", n°175, février 2013.
[1]FORMARIER (M), Accueil, in Les Concepts en Sciences Infirmières, 2ème Ed, Editions Mallet Conseil, Paris, 2012.
[2] « Les aquillit et tempeste et oret ». v. 53.
[3] MATHIEU-ROSAY (J), Dictionnaire étymologique, Nouvelles éditions Marabout, Alleur, 1985. Le Grand Robert de Langue Française en fait un synonyme d’assaillir, tout comme le Littré.
[4] FOUCAULT (M), Histoire de la folie, 10/18, Paris, 1974.
[5] Bauman Z., Vies perdues : La modernité et ses exclus, Payot, Paris, 2006.
[6] Bauman Z., Etrangers à nos portes, Premier parallèle, Paris, 2020.
[7] REY (A) (dir), Grand Robert de Langue Française, Dictionnaires Le Robert, Paris, 2001.
[8] GOFFMAN (E), Asiles. Etudes sur la condition sociale des malades mentaux, Editions de minuit, Paris, 1968.
[9] ROSENHAM (D.L), Etre sain dans un environnement malade, in Watzlawick (P), L’invention de la réalité, Paris, Seuil, 1988.
[10] HALL (E.T), La dimension cachée, Points Seuil, Paris, 1971.
[11] GOFFMAN (E), La mise en scène de la vie quotidienne, t.2, Les relations en public, Les Editions de minuit, Paris, 1973.
[12] DIBIE (P), Ethnologie de la porte, Editions Métailié, Paris 2012.
[13] Ibid.
[14] Jodelet D., Les représentations sociales, PUF, Paris, 2003.
[15] Marandon de Montyel à Ville-Evrard, à la fin du XIXème siècle, Maurice Dide à Toulouse (Braqueville).
[16] Baillon G., Quel accueil pour la folie ?, Coll. Collectif Psy, Editions Champs social, Nîmes, 2011.
[17] Baillon G., Les Urgences de la folie. L’accueil en santé mentale, Coll. Des pensées et des actes en santé mentale, Gaëtan Morin éditeur, Paris, 1998.
[18] Billé V., Gonsalvès, Lamarch-Vadl A., Verdoux H., « « C’est possible », réduire la coercition dans les soins pour les personnes adultes vivant avec des troubles neurodéveloppementaux : une étude à devis mixte », in Recherche en soins infirmiers, 2023/2, n°153.
[19] Quenum Y., « Le plan de crise conjoint de Gabriel », in Santé Mentale, n°277, Avril 2023.
[20] VAN GENNEP (A), Les rites de passage : étude systématique ..., Paris, E. Nourry, rééd. 1981.
[21] SEGALEN (M), Rites et rituels contemporains, Nathan université, 1998.
[22] ERNY (P), Rites de passage : d’ailleurs, ici, pour ailleurs, éditions ERES, 1994.
[23] BOURDIEU (P), Les rites comme actes d’institution, Actes de recherches en sciences sociales, 1982.
[24] FUSTIER (P), Les corridors du quotidien, Dunod, Paris, 1993.
[25] Ibid.
[26] Ibid.
[27] Ibid.
[28] Ibid.
[29] DEPRE (V), JAMET (J.M), L’accueil en psychiatrie. Aspects juridique, théorique, pratique. Editions Hospitalières, Paris, 1997.
[30] OURY (J), Rencontre et inférences abductives. Evénement, narrativité et « possibillation », in La rencontre. Chemin qui se fait en marchant, Arcanes, Les Cahiers d’Arcanes, Apertura, Paris, 2000, pp. 43-52.
[31] Ibid.
[32] Ibid.
[33] Ibid.
[34] MALDINEY (H), Penser l’homme et la folie, Million, Paris, 1997.
[35] OURY (J), Rencontre et inférences abductives. Evénement, narrativité et « possibillation », op. cit.
Date de dernière mise à jour : 20/11/2023
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