Bibliographie Spécifique Isolement et Contention

Bibliographie spécifique Isolement, contention et violence dans les soins

Les publications sur l’isolement et la contention se multipliant aujourd’hui (ouvrages médicaux, mémoires d’IPA, de juristes, d’éthiciens, etc.), il nous apparaît important de retracer le parcours et les publications d’infirmiers pionniers régulièrement oubliés par les moteurs de recherches et des auteurs pas toujours scrupuleux.

En 1994, les membres du Groupe de Recherche en Soins Infirmiers du XIVème secteur de Paris (Centre Hospitalier Esquirol, Saint-Maurice, 94), après avoir travaillé sur ce que savent les patients sur leur traitement médicamenteux, ouvrent une nouvelle piste de recherche sur la chambre d’isolement et la contention. Leurs réflexions croisent et accompagnent celles de Dominique Friard (lui-même coordonnateur du groupe) qui termine son DEA de droit médical (Paris VIII) consacré à la chambre d’isolement et à la contention et à leur articulation juridique avec le droit et aux conséquences cliniques et pratiques du vide juridique qu’il décrit. Danielle Gourves (cadre de santé), Anne-Marie Leyreloup (ISP, spécialiste clinique), Marie Rajablat (ISP), Joëlle Louesdon (ISP) et Dominique Friard (ISP) puis Emmanuel Digonnet (ISP) interviennent dans différents congrès et publient sur ce thème décrié.  

Leurs premières publications datent d’octobre 1995. D’autres, pas si nombreuses, les ont précédés : la thèse de Paumelle, celle de Pépier en 1992 et les écrits de J-P Vignat. Et bien sûr celles de Tom Mason.  

FRIARD (D), LEYRELOUP (A.M), “ Ethique et droits du patients ” in Profession infirmière, n°42, Octobre 1995, pp. 16-17.

FRIARD (D), LEYRELOUP (A.M), “ Chambre d’isolement et soins intensifs ” in Profession Infirmière n°43, Novembre 1995, pp. 16-17.

Il est intéressant de noter que ces deux premières publications sur l’isolement ont pour cadre une revue de soins dédiée aux soins somatiques où la psychiatrie occupe une place habituellement restreinte.

Février 1996, premières journées d’études dédiées à l’isolement

Les 8 et 9 février 1996, deux journées d’études sont consacrées à la Chambre d’isolement. Organisée par le XIVème secteur de Paris et les membres du groupe de Recherche, elle a pour objectif de rassembler les différents corps soignants afin de travailler les aspects cliniques, historiques, légaux … des pratiques psychiatriques qui utilisent l’isolement dans la mise en place des conduites thérapeutiques. Le contenu des différentes interventions peut être lu sur l’ancien site Serpsy : congre_isolement (serpsy.org).

Le CH Esquirol, étant jumelé avec différents hôpitaux, le point de vue est résolument international (Russie, Allemagne, Grande-Bretagne). Ainsi découvre-t-on des pratiques russes de contention sans isolement (camisoles) ; les fixations au lit, alternatives à l’isolement, en Allemagne ; la formation généralisée des personnels à l’apaisement des agitations sans isolement ni contention (pratiques britanniques).  

Les deux jours mobilisent des psychiatres (l’universitaire G. Lanteri-Laura ; M. Windisch, chef de service du XIVème secteur de Paris ; G. Richon, chef de service à Thouars (79) ; Jean-Louis Terra qui coordonne l’audit clinique sur la chambre d’isolement pour l’ANAES – devenue depuis la HAS- ; C. Gaussares, psychiatre à l’UMD de Cadillac (33) ; P. Katchalov, Dr. Kazantsev, psychiatres à l’Institut Serbski de Moscou ; Dr. A Abraham, chef de service au Princess Royal Hospital, V. Bouville et Becker, psychiatres berlinois ; J-L Roelandt, chef de service à Armentières, Lille (59). Nous n’insistons sur cette participation des psychiatres que pour montrer qu’il y eut un moment où un certain nombre d’entre eux (probablement pas la majorité) se sentaient suffisamment concernés par cette question pour décrire leurs pratiques et celles de leurs équipes. Les soignants étrangers, outre leur référence à des textes de lois repérés, énoncés et connus avaient tous en commun de pouvoir décrire le nombre de patients concernés, le nombre d’heures de contention ou d’isolement par patient, ce qui n’était alors pas possible en France.  

Une avocate décrit le vide juridique dans lequel se trouvaient alors l’isolement et la contention.

Les infirmiers mobilisés : J-Y Audigout, J-M Jamet, A. Lasson, M. Abt, N. Dolbeau, S. Selod, D. Gourves, A-M Leyreloup, D. Friard, L. Mooroogen, infirmiers ou cadres, avec bagage universitaire ou non ont abordés de façon concrète les questions cliniques, pratiques et éthiques.

Notons enfin que la dernière intervention reflétait le vécu de dix patients interrogés dans le cadre du mémoire de DEA de D. Friard.

1 - Panorama historique de l'isolement en psychiatrique Pr. G. Lantéri-Laura

2 - Du consentement .... à l'isolement Dr. M. Windisch

3 - La chambre d'isolement, de la culpabilité au soin Dr. Richon

4 - De l'audit clinique à l'assurance qualité à propos de l'utilisation de la chambre d'isolement en psychiatrie Pr. J.L. Terra

5 - La difficulté d'évaluer les pratiques M. J. Y. Audigout

6 - Ethique et isolement M. J.M. Jamet, M. A. Lasson

7 - Soins infirmiers ou accompagnement infirmier du patient isolé Mme M. Apt, Mme N. Dolbeau

8 - De l'obligation de soins Dr. Gaussares

9 - Des méthodes de contraintes physiques dans les services psychiatriques russes Dr. P. Katchalov, Dr. Kazantsev

10 - Les "fixations" : une alternative à l'isolement ? Dr. V. Bouville, Dr. Becker

11 - La pratique de l'isolement au Princess Royal Hospital, en Grande-Bretagne Dr. A Abraham, Mr. L. Mooroogen

12 - Pavillon 11 - Procès de la folie. A propos de la fermeture du pavillon de force. Armentières 1984. Dr. G. Roelandt, Mme S. Selod

13 - Le statut juridique de l'isolement psychiatrique Me. Dorsner-Dolivet

14 - Et pourquoi pas demander à Danton s'il faut changer le nom de la guillotine ? M. D. Friard, Mmes D. Gourves, A.M. Leyreloup

Quatre cents personnes participèrent à ces journées qui furent riches en débats et confrontations d’idées.

Le dossier de la revue Soins psychiatrie

Le Groupe de Recherche avait suffisamment avancé pour proposer, dès janvier 1996, un dossier sur l’isolement à la revue Soins Psychiatrie

FRIARD (D), LEYRELOUP (A.M), “ Chambre d’isolement et chambre de soins intensifs ”, in Soins Psychiatrie n°181, Mars 1996, pp. 5-7.

FRIARD D., LEYRELOUP A.M., “ Elaboration d’une recherche ”, in Soins Psychiatrie n°181, Mars 1996, pp. 7-10.

FRIARD D., LEYRELOUP A.M., “ Le cadre réglementaire ”, in Soins Psychiatrie n°181, Mars 1996, pp. 10-17.

FRIARD D., LEYRELOUP A.M., “ Un sens à préciser ”, in Soins Psychiatrie n°181, Mars 1996, pp. 17-19.

FRIARD D., GOURVES D., LEYRELOUP A.M., “ Modalités pratiques ”, in Soins Psychiatrie n°181, Mars 1996, pp. 19-27.

FRIARD D. “ Un isolement peut en cacher un autre ”, in Soins Psychiatrie n°181, Mars 1996, pp. 27-32.

Un dossier entier est consacré à la question de l’isolement. Les membres du groupe de recherche ne sont pas les seuls contributeurs. J-F Popielski (ISP alors cadre de santé à Clermont de L’Oise), publie un article sur une chambre d’isolement modulable. Ainsi, dès 1996, les soignants qui souhaitent réfléchir à leur pratique disposent d’un outil pour le faire.

Le CEDEP (Comité Européen Droit Ethique et Psychiatrie) de Claude Louzoun propose au Groupe de Recherche de reprendre et d’étoffer son intervention présentée à la journée esquirolienne. Première publication dans une revue hors ghetto infirmier.  

FRIARD D., LEYRELOUP A.M., “ Et pourquoi pas demander à Danton s’il faut changer le nom de la guillotine ? ”, in Pollen, revue du CEDEP, Septembre 1996.

L’institut ISIS (Institut de Soins Infirmiers Supérieurs), en partenariat avec la revue Santé Mentale consacre trois jours (5, 6 et 7 mars 1997) à la violence dans les soins. Les membres du Groupe de Recherche en Soins interviennent en plénière et animent des ateliers. Un jeune infirmier F. Masseix qui exerce à Ville-Evrard rejoint le groupe. Le psychiatre P-L Lavoine participe activement aux travaux du groupe et s’en inspire au Centre Hospitalier Les Murets à La Queue-en-Brie. P.L. Lavoine et D. Friard intègrent l’European Violence Group of Research, un groupe de Recherche qui regroupe des soignants de tous les pays européens autour de la thématique de la violence. Ils participent, à leurs frais, aux rencontres d’Amsterdam puis de Dublin (avec Marie Rajablat). Faute de financement, malgré des demandes réitérées au ministère de la santé, ils renoncent à poursuivre ces travaux. La France en sera absente et ne participera plus au développement de la réflexion européenne.

FRIARD D., « Isolement et contention : comment ne pas en faire un acte de violence ? » in Santé Mentale, n° 16, mars 1997, pp. 10-15.

FRIARD D., MASSEIX F., « Isolement thérapeutique », in Soins, n° 614, Avril 1997, pp. 32-36.

L’isolement en psychiatrie : séquestration ou soin ? Le livre

Les publications sont suffisamment repérables pour que l’éditeur de l’Encyclopédie Universalis demande à D. Friard de rédiger l’article « Isolement » de son encyclopédie. Il est le premier et reste le seul ISP à avoir écrit une notice pour cette encyclopédie.

Les éditions Masson lui proposent d’écrire un ouvrage à partir du texte de son D.E.A et des différents articles publiés. C’est chose faite en juin 1998. Les soignants qui s’intéressent à la question de l’isolement ont à leur disposition des articles, une notice dans une encyclopédie et un ouvrage publié chez un bon éditeur. L’ouvrage, épuisé, sera largement actualisé et réécrit en 2003.   

FRIARD D., Isolement (article), in Encyclopédia Universalis, Paris, 1998.

FRIARD D., La chambre d’isolement en psychiatrie : séquestration ou soin ?, Editions Hospitalières, coll. "Souffrance psychique et soins". Janvier 1998. Réédition mars 2003.

LAVOINE P.L., FRIARD D., « La chambre d’isolement en psychiatrie : séquestration ou soins ? » in Psychiatrie, 1998, n° 210, pp. 3706-3710.

FRIARD D., “ Isoler l’isolement ”, in Santé Mentale, n°32, Novembre 1998, p. 9.

En septembre 1998, D. Friard quitte le CH Esquirol pour le Centre Hospitalier de Laragne (05) qui se passe allègrement d’isolement et de contention. Il s’y sent comme un poisson dans l’eau. Il cherche alors à repérer ce qui fait que cet établissement est un des rares à ignorer collectivement ces mesures coercitives. Ses publications prennent un tournant.  

Isolement et contention au Canada

A l’été 1999, l’AGIDD-SMQ (Association des Groupes d'Intervention en Défense de Droits en Santé Mentale au Québec), une association d’usagers des soins psychiatriques qui couvre tout le Canada, organise, à Montréal, un Colloque de deux jours sur l’isolement et la contention, à l’occasion de la modification de la loi canadienne sur la contention. Marie Rajablat et D. Friard y sont invités. Ils y croisent le psychiatre S. Tomkiewicz dont l’engagement contre la violence institutionnelle remonte au ghetto de Varsovie. Ils visitent ensemble le Douglas Hospital de Montréal. Les pratiques leur semblent tellement archaïques et violentes qu’ils déclenchent un véritable scandale dans la presse locale. Les étapes de ce voyage ont été racontées ailleurs. Quebec (serpsy.org), Mortimer (serpsy.org)

Ce fut pour ces soignants l’occasion de découvrir Tom Mason, le chercheur en ethnométhodologie qui a sûrement le plus publié sur cette question et celui qui en connait le mieux les arcanes. Ses nombreuses publications devraient être traduites en français.

FRIARD D., Besoin d’hommes, in Santé Mentale, n° 42, Violences à l’hôpital, novembre 1999, pp. 48-51.

ARENE P. (pseudo), Ici la violence est interdite, in Santé Mentale, n° 43, décembre 1999, pp. 12-16.

MONCEAU M., Soigner en psychiatrie, entre violence et vulnérabilité, Gaëtan Morin Editeur, Coll. Des actes et des hommes, Paris, 1999. Un ouvrage de sociologue.

MILLARD R., RAJABLAT M., FRIARD D., Trompe la mort, in Santé Mentale, n° 48, mai 2000, pp. 14-17.

L’isolement et la contention aux Etats Généraux de la psychiatrie

A priori, en juin 2003, pour les 2000 congressistes, l’isolement et la contention ne faisaient pas partie du menu des Etats Généraux de la psychiatrie. Quatre psychiatres faisaient un rapport qu’un psychologue et un infirmier avaient le droit de commenter. Dès la première table ronde, ça explose. Le premier psychiatre, libéral, parle d’un monde de bisounours, où le seul problème pour la psychiatrie est le prix des consultations. En 5 minutes, D. Friard fait exploser ce beau consensus et met l’isolement et la contention au centre des débats. Son intervention et celle de ses collègues peut être consultable sur l’ancien site Serpsy. Il est interviewé par E. Favereau de Libération. ancien.serpsy.org/montpellier/dominique_montpellier.html, ancien.serpsy.org/montpellier/montpellier_index.html

ARENE P., « La folie est une pathologie de la liberté », in Santé Mentale, n° 45, Quelle place pour les usagers ? Février 2000, pp. 48-50.

FRIARD D., « Qui veut noyer son chat l’accuse de … psychopathie », in Santé Mentale, n° 46, La psychopathie, avril 2000, pp. 31-34.

FRIARD D., « Régulation et rencontres communautaires », in Soins psychiatrie, n° 208, Les limites, mai/juin 2000, pp. 20-24.

FRIARD D., « Peut-on refuser de prendre un neuroleptique ? » in Santé Mentale, n° 68, Observance, ton traitement tu prendras, mai 2002, pp. 44-45.

FRIARD D., « De la violence dans les soins », in Droit, déontologie et soin, vol 3, n° 1, mars 2003, pp. 73-88.

CHAMBORT (F) (Pseudo), « Les deux psychiatries », in Santé Mentale, n° 79, juin 2003, pp. 10-11.

FRIARD D., « Le twist des clés », in Soins Psychiatrie, n° 228, Les clés en psychiatrie, septembre/octobre 2003, pp. 21-24.

DIGONNET E., FRIARD D., LEYRELOUP A.M, RAJABLAT M., « De la folie, du normal et du pathologique », in Santé Mentale, n° 81, L’homme et la folie, octobre 2003, pp. 34-41.

FRIARD D., « Le bateau ivre », in Santé Mentale, n° 81, L’homme et la folie, octobre 2003, pp.48-53.

HECKTOR L. (pseudo), « Observer et décrire la violence », in Santé Mentale, n° 82, La violence en psychiatrie, novembre 2003, pp. 26-30.

Deux ouvrages sur l’isolement et la contention + 1

L’année 2003 voit la réédition de « Séquestration ou soin » chez Masson et la publication, également par Masson, d’un nouvel ouvrage sur le thème par le psychiatre J. Palazzolo : « Chambre d’isolement et contentions en psychiatrie ». Si l’on peut reprocher à l’auteur d’adhérer d’un peu trop près à l’idée que l’isolement est thérapeutique, les soignants n’en ont pas moins deux ouvrages à leur disposition pour réfléchir à leurs pratiques et des dizaines d’articles (nous sommes de moins en moins exhaustifs). Le drame de Pau et la mise en place d’une consolidation des savoirs en psychiatrie et du tutorat auraient pu inciter les soignants à lire et à critiquer ces ouvrages et ces articles. Il semble qu’il n’en ait rien été. La période 2003-2005 voit se multiplier les isolements et les contentions malgré les Recommandations publiées par la HAS en 1998, à moins que ce ne soit grâce à cette publication qui les aurait en quelque sorte légitimées. Le préfet des Hautes-Alpes ne comprenait pas pourquoi les soignants de Laragne refusait une pratique pourtant recommandée par la Haute Autorité de Santé.    

Aude Caria, dans le registre de la qualité, publie, en 2003, un ouvrage collectif dans lequel A-M Leyreloup et E. Digonnet font un plaidoyer pour l’ouverture des portes des unités.

LEYRELOUP A-M, DIGONNET E., « La liberté de circulation : portes ouvertes, portes fermées », in Caria (dir.), Démarche Qualité en santé mentale. Une politique au service des patients, Coll. Des pensées et des actes en Santé Mentale, Editions in Press, Paris, 2003, pp.329-344.

FRIARD D., « Isoler l’isolement ou le contextualiser ? », in Caria (dir.), Démarche Qualité en santé mentale. Une politique au service des patients, Coll. Des pensées et des actes en Santé Mentale, Editions in Press, Paris, 2003, pp. 345-359.

MORIN P., « Au-delà des contentions », », in Caria (dir.), Démarche Qualité en santé mentale. Une politique au service des patients, Coll. Des pensées et des actes en Santé Mentale, Editions in Press, Paris, 2003, pp. 359-369.

Il est intéressant de noter que ces trois textes constituent le chapitre intitulé : « Ce qu’il reste à faire ». Vingt ans après qui peut répondre à cette question.  

FRIARD D., « Attacher n’est pas contenir », in Santé Mentale, n° 86, Contenir …, mars 2004, pp. 16-28.

BOISARD G., FRIARD D., « Champ ouvert sur chambre fermée », in Santé Mentale, n° 101, octobre 2005, pp. 10-12.

FRIARD D, « Sœur O. et Mme E, les oubliées de la révolution psychiatrique », in Soins n° 704, avril 2006, pp.46-48.

HECKTOR L. (pseudo), « Attention, danger ! » in Santé Mentale n° 128, mai 2008, A propos de la dangerosité, pp. 62-65.

Le discours d’Antony

Le discours d’Antony va donner un coup fatal ( ?) à la remise en cause des pratiques coercitives. Aucun des psychiatres présents ne sortira de la salle. Ils applaudiront même Sarkozy. Avant de réfléchir et de multiplier les appels à la résistance. Ce remords culminera avec la création des 39.

La multiplication des UMD, des UPID, UMAP et la création de 200 chambres d’isolement supplémentaires avec budget afférent va tout emporter. Le loi de juillet 2011 remet le sécuritaire au goût du jour. Peu d’établissements refuseront cette manne à l’odeur nauséabonde. Le Centre Hospitalier de Laragne y gagnera d’être contrôlé par tout ce que la république compte d’IGAS et de MNASM.

La réflexion ne s’en poursuit pas moins, elle prend la forme de la résistance. Ainsi l’association Serpsy consacre une de ses journées annuelles au « Contenir ».

Le dossier de la revue Santé Mentale : Le vécu des patients en chambre d’isolement

La parole des soignants n’étant pas plus entendue que celle des usagers, la revue Santé Mentale décide de consacrer un dossier au vécu des sujets isolés. « Les protocoles d’isolement que nous appliquons avec plus ou moins de finesse et de rigidité masquent la souffrance d’hommes et de femmes qui se débattent pour exister. Comment vivent-ils ces isolements et contentions que nous leur estimons nécessaires ? L’isolement rajoute-t-il à la souffrance ? Leur permet-il de recouvrer un peu de santé psychique ? » L’argumentaire est clair. C’est la première fois, en France, qu’une revue de psychiatrie consacre un dossier à ce que vivent les sujets quand ils sont isolés ou attachés.

Le dossier est introduit par le psychiatre lyonnais J-P. Vignat qui milite depuis très longtemps pour la limitation des isolements.

Vignat J-P, « De l’isolement au soin intensif », in Santé Mentale, n° 139, juin 2009.

Friard D., « Isolement : « Trouvez une autre solution ! », in Santé Mentale, n° 139, juin 2009.

Fadhlaoui C., « Hors de lui, hors de tout lien, hors du monde », in Santé Mentale, n° 139, juin 2009. Cette psychologue fait l’hypothèse que la chambre d’isolement pourrait être un moyen « autocalmant » qui évite aux soignants d’accompagner les moments terrifiants de désorganisation de certains patients.

Ethuin C., « L’isolement n’est pas thérapeutique », in Santé Mentale, n° 139, juin 2009. Claude, président de Nord Mentalités, présente le vécu de Marie.

Ashadeh L., Clinerth E Van, Siran P., « Un dialogue de sourds », in Santé Mentale, n° 139, juin 2009. Trois infirmières décrivent comment des dysfonctionnements majeurs conduisent à une chambre abusive et répétée.

Collectif Commission « Partage des pratiques » de la Fédération Régionale de Recherche en Santé Mentale du Nord-Pas de Calais, « Une zone de non-droit ? », in Santé Mentale, n° 139, juin 2009.

Gauthier D., « Le soin sans enfermement », in Santé Mentale, n° 139, juin 2009. D. Gauthier, psychiatre, chef de pôle au Centre Hospitalier de Laragne (05) décrit comment dans son établissement on se dispense de chambre d’isolement. Un engagement quotidien porté par l’esprit de la psychiatrie institutionnelle.

 Gauthier D., « Puisqu’il s’agit d’une recommandation … », in Santé Mentale, n° 139, juin 2009. Réflexion et bras de fer autour d’une question administrative posée par le Préfet des Hautes-Alpes : « Comment se fait-il, alors que l’emploi des chambres d’isolement fait l’objet d’une recommandation de la Haute Autorité de Santé, que les soignants y soient opposés ? ». Récit et analyse d’une lutte laragnaise.

Fontaine D., « De la contrainte au soin », in Santé Mentale, n° 139, juin 2009. L’auteur, cadre-infirmier à l’UMD de Montfavet (84), qui a dédié son mémoire de master à la question de l’isolement invite les soignants à privilégier le raisonnement clinique, même aux dépense de la lettre du protocole.

Perret P., « L’entretien de recueil de vécu », in Santé Mentale, n° 139, juin 2009. L’auteur, psychologue clinicien, fait le constat que l’entretien de reprise post-isolement n’améliore pas le ressenti des patients mais leur permet de prendre du recul sur cette expérience douloureuse.

Giloux N., « Une chambre protégée et structurante », in Santé Mentale, n° 139, juin 2009. L’auteure, psychiatre au Vinatier, a participé à de nombreuses expositions à la Ferme du Vinatier, notamment lorsque l’espace muséographique a fait appel à Dual Design, des architectes designeur qui ont élaboré sept modèles de chambre d’isolement, à partir des demandes et des propositions de soignants et d’usagers.

Halos J., « Isolement : débattre et évaluer », in Santé Mentale, n° 139, juin 2009. Un directeur qui recommande l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP), le développement des pratiques alternatives et l’écoute active des patients.

Un dossier très riche qui sera repris par le quotidien Libération.

La revue Santé Mentale va continuer, au fil de l’eau, à interroger régulièrement l’isolement et la contention dans des dossiers dédiés que nous ne saurions tous reprendre.  

FRIARD (D), KIEFFER (A-S), « Les femmes, la violence et l’équipe soignante », in Santé Mentale, n° 186, mars 2014, Faire équipe, pp. 40-45.

FRIARD D., « De l’agitation à la violence », in Santé Mentale, n° 187, Avril 2014, pp. 20-25.

FRIARD D., « Brève histoire de l’enfermement », in Santé Mentale, n° 199, octobre 2015.

FRIARD D., « Le soin porte ouverte, une pratique honteuse ? » in Santé Mentale, n° 199, octobre 2015.

Derniers recours

En 2016, une première restriction est énoncée par la loi, en réservant l’isolement et la contention au dernier recours, ce qui est une absurdité deux mesures, aussi coercitives l’une que l’autre, ne peuvent être de dernier recours (même si elles n’ont pas les mêmes conséquences sur les patients).

Les publications se multiplient. Nous ne saurions les citer toutes. Nous mettrons en avant d’abord celles d’André Bitton et du CRPA qui ont petit à petit désossé la loi de juillet 2011 et poursuivent la lutte juridique contre les mesures coercitives, sans oublier celles de nos collègues de l’ADRPsy (rassemblés autour de J-P Lanquetin et L. Rohr) qui œuvrent et militent pour le moindre recours et obtiennent de beaux résultats dans la région Rhône-Alpes.

FRIARD D., « Le dernier recours, un concept fragile », in Santé Mentale, n° 210, septembre 2016.

FRIARD D., « Limiter l’isolement, supprimer la contention », in Santé Mentale, n° 222, novembre 2017.

LANQUETIN J-P, ROHR L., « Moindre recours, comment faire ? », in Santé Mentale, n° 222, novembre 2017.

FRIARD D., « L’organisation des soins à l’hôpital psychiatrique et la possibilité d’une régulation sans isolement, ni contention », in Perspective soignante, n° 65, Septembre 2019, Ed Seli Arslan, pp. 7-32.

FRIARD D., « Soigner sans attacher, on a su faire », in Santé Mentale, n°260, Septembre 2021.

LANQUETIN J-P, « Moindre recours : « Et vous comment faites-vous ? », in Santé Mentale, n°260, Septembre 2021.

ROBIN C., LANQUETIN J-P, « Alternatives à la contrainte : et concrètement ? », in Santé Mentale, n°260, Septembre 2021.

FRIARD D., LANQUETIN J-P, En psychiatrie, in Contention et privation de liberté des personnes soignées en institution et à domicile, Coll. Soigner et accompagner, Editions Lamarre, Paris, 2021. Avec cette publication qui rassemble des contributions de tous les champs disciplinaires du soin, la contention n’est plus le problème de la seule psychiatrie.

VERSTEEGH P & C, Alcôves, Infolio, Gollion, Suisse, Août 2021. Cette publication suisse à l’iconographie très riche, mêle clinique, droit des patients et architecture, ce qui lui confère une originalité certaine.

Cette bibliographie, loin d’être exhaustive, permet aux chercheurs de trouver, citer, réfléchir avec ces nombreux soignants qui se sont préoccupés de mieux connaître les isolements et contentions, d’en connaître et d’en critiquer, au cas par cas, les décisions (ou prescriptions selon les époques) pour en réduire le nombre.

 

Date de dernière mise à jour : 11/04/2023

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