Crise sanitaire//Crise du soin

Crise sanitaire// Crise du soin

Le soin oublié: comment la politique de soin du début 21ème siècle a sacrifié soignants et soignés.

La crise sanitaire oblige chaque soignant à repenser le soin, ses valeurs durement remises en cause par les discours politiques, scientifiques et l'approche gestionnaire de la pandémie et des soins. Charlotte, une jeune infirmière, qui a travaillé en USLD, pendant le premier confinement, s'interroge ... Le début d'une réflexion qui l'amène à s'interroger sur les mécanismes de défense mobilisés par les soignants pour tenter de faire face.

Soins

Au-delà d’une crise sanitaire qui rappelle à chacun que l’état de « bonne santé » n’est pas acquis, que l’imprévisible est à chaque tournant de vie, la nécessité du soin est devenue sujet d’actualité…

Et justement, le soin, ce grand oublié du début 21ème siècle, qu’est-il devenu?

Soigner… La définition pourrait être : prodiguer ou « procurer des soins » (Larousse), un synonyme « s’occuper de ».

Et le soin qu’est-ce que c’est? Un acte réalisé pour améliorer la santé de l’autre, pour augmenter son bien-être dans le respect de sa dignité ? Considérer l’autre -n’importe quel autre- comme méritant que l’on fasse attention à lui, qu’on lui porte une attention toute particulière ?

C’est peut être aussi considérer que chacun est digne de recevoir ce don de soi. Don de soi pourquoi ?

Parce que soigner c’est s’impliquer, s’engager envers quelqu’un, créer du lien.

Le soin tout comme la santé est multidimensionnel. On nous l’a assez répété: on ne soigne pas un corps mais une personne dans toutes ses dimensions. Ce qui touche le corps touche aussi le psychique, l’émotionnel, le relationnel, le social…

Donc un soin ne serait pas qu’une production de service ? Il serait autre chose qu’un acte technique démultiplié dans une journée ?

C’est ce que nous, soignants, devons rappeler à la gent politique et peut être aussi à tous ceux qui l’ont oublié, tous ceux qui n’ont jamais été soigné ou qui ne l’ont pas été depuis longtemps.

Parce qu’enfin SOIGNER DEMANDE DES MOYENS. Le rapport humain à l’autre est nécessaire à travers le soin et il demande des moyens répétons-le, autant que le soin technique si ce n’est plus. Un soignant privé de moyens est un soignant stressé, puis souffrant, amputé de cette nécessaire relation à l’autre, développant des mécanismes de défense qui vont déshumaniser le soin (fuite, distanciation, technicisation). Et que dire du soigné privé de soignants ayant les moyens suffisants pour s’occuper de lui ? Lui aussi il souffre, malade et seul, d’autant plus seul que le soignant n’a pas les moyens d’être auprès de lui. Oublié.

Alors valorisons à nouveau les compétences relationnelles du soignant, ne les oublions pas, ne les sacrifions pas. Elles font de nous des soignants forts et heureux et elles permettent au soigné de se nourrir de cette force. La création du lien soignant soigné est aussi importante pour l’un que pour l’autre c’est sans doute ce que démontre la souffrance soignante actuelle. Beaucoup d’acteurs de soin sont victimes d’une approche déshumanisée du soin, amputés d’une partie de leur savoir : le savoir être.

La production des soins doit cesser ou il faudra remplacer les soignants par des robots. Parce qu’aujourd’hui on n’a pas partout les moyens de prodiguer des soins: on produit, on multiplie des actes techniques, sans empathie. Ou alors on sombre, à force d’épuisement et d’avoir trop lutté contre l’effondrement d’un système de santé.

Charlotte Rodet, IDE

 

 

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