Une journée d'hommage à André Roumieux à Rodez

Une journée d’hommage à André Roumieux à Rodez

 

Ce samedi 2 avril 2022, l’Association Rodez-Antonin Artaud, rendait hommage à l’écrivain-infirmier psychiatrique André Roumieux (1932-2020). Tant d’infirmiers, qui travaillent en psychiatrie, ignorent qui fut André Roumieux qu’il est surprenant qu’une association ruthénoise destinée à faire connaître la vie et l’œuvre d’Antonin Artaud, en absence de tout lien institutionnel à la psychiatrie, s’intéresse à notre ancien collègue. Enseignants, comédiens, pharmacien d’officine à la retraite, passionnés de théâtre et de poésie se sont donc retrouvés ce samedi, à Rodez, à la salle de Conférence du Centre Culturel des Archives Départementales autour de l’œuvre d’André.

Larrouy

Mireille Larrouy, Présidente de l’Association, auteure d’un ouvrage intitulé Artaud et le théâtre ou Les 15 ans de bonheur d’Antonin Artaud a présenté qui était André : « Discret et modeste, passionné d’archives d’histoire contemporaine, co-auteur avec Laurent Dachin d’un ouvrage essentiel « Artaud et l’asile » André Roumieux a effectué sa carrière d’infirmier psychiatrique à Ville-Evrard. Il publie des témoignages : « Je travaille à l’asile d’aliénés », La tisane et la camisole », « Mur, destin et histoire d’un hôpital psychiatrique » mais aussi des ouvrages sur l’abbé Pierre, Max Jacob, Jean Dubuffet ou encore sur sa région du Quercy ou sur le premier sénateur dreyfusard, Auguste Scheurer-Kestner … Sa culture d’autodidacte était immense. » Je pensais bien connaître André que j’ai rencontré quelquefois à Ville-Evrard au musée de la SERHEP (Société d’Etudes et de Recherche Historique en Psychiatrie) qu’il avait contribué à fonder, à l’IFSI, au C.H. Esquirol, à Saint-Maurice où nous étions intervenus de concert. Jusqu’au Foyer Logement où il s’est éteint en avril 2020. La conférence de Mireille Larrouy m’apprit bien des choses que j’ignorais : par exemple le lien ancien d’André avec l’abbé Pierre et la communauté des Emmaüs. Des lectures de Jean-Auguste Nougaret, responsable Culture à la ville de Rodez ont illustré ses propos.  Mireille avait, elle aussi, rencontré André au musée de la SERHEP. Elle avait appris à connaître l’homme et l’écrivain autour de l’ouvrage Artaud et l’asile. Un lien était né qui était à l’origine de l’hommage rendu.

Portzamparc

Leur succéda Renaud de Portzamparc, psychiatre, psychanalyste, auteur lui-même de deux ouvrages : La folie d’Artaud en 2011 et « Victor l’androïde amoureux » en 2022. Renaud dressa un tableau de la psychiatrie en plusieurs étapes : la rencontre Pussin-Pinel, l’entre-deux guerres au moment où Artaud était interné à Ville-Evrard, dans les années 50 lorsqu’André Roumieux y travaille jusqu’à la période contemporaine qu’il ne fit qu’esquisser me laissant le soin de reprendre cette histoire d’un point de vue d’infirmier de secteur psychiatrique. Ce fut aussi une belle rencontre né du hasard d’une connaissance commune. Renaud ne se sentait pas légitime pour parler de l’évolution d’un métier qu’il ne connaissait plus guère. Il chercha un infirmier pour le faire et me trouva.

Le débat qui suivit fut riche.

Théophile Choquet, comédien, formé aux conservatoires de Metz, de Strasbourg et à l’étranger (Italie, Espagne, Brésil) nous proposa une lecture théâtralisée de larges extraits de Je travaille à l’asile d’aliénés. Il nous fit entendre la subtilité des descriptions d’André. Grâce à lui, j’ai redécouvert des passages entiers d’un ouvrage pourtant lu et parcouru maintes fois. Il a su donner vie à ces histoires de soins.

Antonin Artaud : L'influence d'une oeuvre-vie hors du commun - YouTube

La journée s’acheva par la projection du Film Aloïse de Liliane de Kermadec interprété par Isabelle Huppert et Delphine Seyrig. Ce film retrace l’histoire d’Aloïse Corbaz, internée à l’âge de 30 ans qui va s’exprimer par l’Art pendant ses 45 ans d’asile. Ses toiles illuminent aujourd’hui les salles du Musée d’Art brut de Lausanne.

Cette journée fut pour moi comme un écho de la journée du 21 mars que nous avions organisée au Centre Hospitalier Edouard-Toulouse, au théâtre de l’Astronef, à Marseille et à l’après-midi du 23 mars dédié à l’histoire des Infirmiers en Psychiatrie présentée dans le cadre des 7ème Rencontres de la Recherche pour la Psychiatrie, organisée à Ecully par l’ami Jean-Paul Lanquetin et le Grieps.

La figure d’André Roumieux en fut le fil rouge. Des extraits de La tisane et la Camomille lus par Jean Marie Arnaud-Sanchez, Clément Goguillot, Sylvianne Simonet et Niccolo Scognamoglio, les comédiens associés à l’Astronef, au film projeté pendant les rencontres qui montra les dernières images d’André, en passant par la lecture théâtralisée de Théophile, le rôle éminent joué par André Roumieux dans l’histoire des infirmiers psychiatriques y apparut évident. Merci André.

Dominique Friard, le 4 avril 2022

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